L’Escalade (revue et corrigée par G. Ravay)

L’ESCALADE

En cette nuit du 11 au 12 décembre 1602, la Mère Royaume ne faisait pas la cuisine à 2 heures du matin, elle dormait ; réveillée par le bruit de fêtards sur la Place du Molard, elle s’est levée, a ouvert sa fenêtre et constaté que c’était encore des frontaliers qui festoyaient. « Quézaco ? ça suffit ce bruit, de Dieu de Dieu, y’a des gens qui travaillent demain, on aimerait bien dormir ! ». Tout en gueulant, elle prit alors ce qu’elle avait sous la main :  son « Jules », comme on disait à Ferney, c’est-à-dire son vase de nuit, qu’elle leur versa sur la tête ; mais il lui échappa des mains et descendit avec le contenu… Donc la marmite en choco que vous allez déguster tout à l’heure ne devrait pas contenir de légumes !

Tout ce bruit a réveillé les deux soldats de garde qui s’étaient endormis dans le local voisin : ils avaient trop picolé de Mandement, payé par les chefs de la milice grâce à un système boiteux appelé « carte bancale » : c’est un morceau de carton, pendu au cou, on le montre au magase et on n’a pas besoin de payer : c’est ta banque qui paye !

 Les chefs de milice s’appelaient Barazzone, Barthassa, Maudet, etc. Y’en a même un qui avait une carte bancale à deux faces, de même couleur : l’une à son compte et l’autre face pour l’Etat… alors par distraction, souvent il confondait… bien sûr, la même couleur !

Le Maudet, lui, avait été invité à Ripaille par le Comte de Savoie pour assister à la course de « Forts Mulets Huns », des animaux restés ici après l’invasion des Huns, repartis entretemps. On fêtait chaque année le départ des Huns par une compétition entre les plus forts mulets huns. Le Comte était immensément riche grâce aux ressources du sous-sol, du côté d’Evian : de gigantesques réserves d’eau qu’il vendait très cher au monde entier. Le milliardaire savoyard avait payé la diligence depuis Genève pour toute la famille, ainsi que la taverne où ils logeaient. Il pensait ainsi obtenir des faveurs du Maudet pour entrer plus facilement à Genève et vendre son vin d’Aspremont, un vrai Château Yquem, comparé au Mandement…

Donc, une fois réveillés, les soldats ont alarmé leurs chefs, qui selon une vieille habitude ne prennent pas de risques et envoient les 2 soldats au front où ils voient des frontaliers venus avec des échelles pour marauder les cerises sur le Molard.  « Fait gaffe à cézigue, il a une épée, appelle les copains ! » Et voilà toute la garde qui accourt et chasse les frontaliers. Pas fous les soldats ont gardé leurs échelles : « Comme ça ils ne pourront plus revenir marauder ! » …  Tu parles, ils auraient eu meilleur temps de leur faire boire du mandement, y’zaucpraient pas survécu longtemps, alors qu’ils reviennent encore aujourd’hui, mille fois plus nombreux, et toute l’année !

De retour au cantonnement les soldats s’encoublent au vase de nuit, marchent dans la m… « De bleu de bleu, encore la vieille du 3è qui a lâché son pot de chambre, faudra vraiment la mettre à l’asile !». Heureusement qu’il pleut, ça va nettoyer tout ça et on oubliera vite l’évènement !                                                              

G. Ravay, 30.nov 19

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